Débat public - En mer, en Normandie : de nouvelles éoliennes ?
Débat public sur les futurs appels d'offres d'éoliennes en mer au large de la Normandie
Q14 • Coefficient de disponibilité Eolien Off Shore
Réponse publiée
Malgré l'étude des vents, quel est le coefficient de disponibilité des éoliennes qui seraient installées ? Et quel en sera le coût de production résultant, sans subvention ?
Réponse officielle :
Réponse de la Direction générale de l'énergie et du Climat (DGEC, Maitre d'ouvrage)
1. Coefficient de disponibilité vs. Facteur de charge d’un parc éolien en mer
Le « coefficient de disponibilité » est une expression utilisée pour qualifier les centrales nucléaires. Cela permet d’exprimer la disponibilité de la centrale, en intégrant les indisponibilités techniques des réacteurs (avaries, maintenance des centrales…). Il est le rapport entre l'énergie disponible, durant un intervalle de temps déterminé, et le produit de la puissance nominale en régime continu par cet intervalle de temps. Ainsi, l’énergie produite par les centrales nucléaires dépend de la combinaison de trois facteurs : la puissance installée, le coefficient de disponibilité Kd et le coefficient d’utilisation Ku tel que Kp (coefficient de production) = Kd x Ku. Celui-ci traduit le taux de production effective d’électricité des centrales.
Les éoliennes sont qualifiées de « sources d’énergie intermittentes » car elles dépendent de flux naturels (le vent) qui ne sont pas disponibles en permanence et dont la disponibilité varie sans possibilité de contrôle (source d’énergie non pilotable). Pour l’éolien en mer, le facteur de charge est l’indicateur qui se rapproche le plus du coefficient de disponibilité. Il est le rapport entre le nombre d’heures de fonctionnement en équivalent pleine puissance (incluant les variations météorologiques, ainsi que les indisponibilités techniques dues aux avaries et à la maintenance) et le nombre d’heures de fonctionnement théorique dans l’année (8 760 h).
Le facteur de charge est variable d’une année à l’autre, puisqu’il dépend, entre autre, des régimes de vent. Selon WindEurope, les facteurs de charge annuels des parcs éoliens en mer en Europe en 2017 étaient compris entre 29% et 48%, selon la méthodologie utilisée[1]. En 2018, le facteur de charge moyen de l’ensemble des parcs en mer du Nord était évalué à 37%[2]. Les perspectives de facteurs de charges des parcs éoliens en mer en développement sont cependant nettement supérieures, de l’ordre de 45% compte tenu des progrès technologiques. Equinor, exploitant le parc éolien en mer de Hywind en Ecosse, déclare même un facteur de charge record de 58% pour l’année 2019[3].
2. Le coût de production d’un parc éolien en mer et son raccordement
Le coût d’un parc éolien en mer est de l’ordre d’1,5 à 4 Mds€ pour 1 GW. Sur sa durée de vie, il se décompose de la façon suivante :
Le coût de production est influencé par les caractéristiques du site d’implantation du parc éolien en mer. Le choix des zones de projet préférentielles aura donc une influence sur ce coût. Les facteurs relatifs au choix des sites qui influeront sur ce prix de référence sont :
- La force et la régularité du vent : une différence de 1 m/s en vitesse moyenne engendre une différence de 15 €/MWh environ sur le prix de référence de l’électricité ; la régularité du vent est en outre un facteur d’optimisation du facteur de charge des éoliennes.
- Les caractéristiques du sous-sol marin : un sous-sol sédimentaire engendrera des coûts moins élevés pour les fondations qu’un sous-sol rocheux, et facilitera l’ensouillage des câbles inter-éoliennes et des liaisons de raccordement.
- La profondeur d’eau : plus les fondations sont hautes, plus elles sont coûteuses.
- Le marnage (différence entre le niveau minimum et maximum de la mer avec les marées) : plus il est faible, plus l’accès aux éoliennes pour la maintenance est facilité.
- L’éloignement aux ports pour la construction et la maintenance : les coûts logistiques sont plus importants quand les rotations des navires pour la construction et la maintenance sont plus longues.
Focus sur le raccordement :
Les coûts liés au raccordement dépendent notamment de la distance du parc éolien en mer de la côte. Ils ne représentaient historiquement qu’une part limitée des coûts complets de l’éolien en mer, évaluée entre 10 et 15% pour les premières procédures de mise en concurrence attribuées en France, soit en moyenne 300 M€ par raccordement. Les futurs parcs éoliens en mer pourraient être situés à des distances plus éloignées des côtes que ceux issus des premières procédures de mise en concurrence ; le coût de raccordement unitaire de ces futurs parcs serait alors en moyenne supérieur. Une mutualisation des raccordements et du poste en mer pour plusieurs parcs éoliens proches les uns des autres permettrait cependant des gains significatifs sur les coûts globaux de raccordement.
3. La politique de soutien public au développement de l’éolien en mer
En France, l’État a décidé d’accorder un soutien public au développement d’énergies renouvelables afin d’accroître son effort dans la lutte contre le changement climatique et de diversifier son mix énergétique.
Pour les installations de forte puissance comme les parcs éoliens en mer, cette subvention est versée sous la forme d’un complément de rémunération, contractualisé entre le porteur de projet et EDF Obligation d’Achat (EDF OA). Les fonds versés par EDF OA proviennent du compte d’affectation spéciale Transition Energétique (CASTE), alimenté par une partie des recettes des taxes intérieures de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) – qui s’applique notamment aux carburants fossiles essence et diésel, et de la taxe intérieure de consommation sur le charbon (TICC) qui s’applique sur les houilles, lignites et cokes. Cela signifie donc que le soutien aux énergies renouvelables n’est pas financé par le contribuable mais par des taxes sur des produits énergétiques fortement émetteurs de CO2.
Pour un parc éolien de 1 GW, la réalisation du projet représenterait un investissement de 1,5 à 3 Mds€ environ, en fonction des caractéristiques du site et du parc. En supposant que ce parc fonctionnerait l’équivalent de 4 000 heures par an, et en supposant un tarif de 60€/MWh sur 20 ans et des prix de marché de l’électricité de 40€/MWh, le coût de soutien s’élèverait à 80 M€ par an, soit 1,6 Mds€ sur 20 ans. Cependant, en cas d’augmentation des prix de marché de l’électricité et de maintien des prix proposés par les candidats à des niveaux peu élevés (compte tenu de la maturité de la filière et en fonction des caractéristiques plus ou moins optimales des sites proposés) les parcs éoliens en mer pourraient représenter une source de revenu net pour l’État.
En effet, grâce notamment au développement récent de la filière, le coût de soutien public par parc éolien en mer décroît fortement. Ainsi, pour le projet au large de Dunkerque, dernier projet ayant fait l’objet d’une procédure de mise en concurrence en France et attribué en juin 2019 à un consortium mené par EDF Renouvelables, le prix de référence fixé par le lauréat est de 44€/MWh, soit aux alentours du prix de marché actuel. Lorsque le prix de marché de l’électricité sera supérieur au prix de référence, la différence sera reversée au budget de l’État. La Commission de Régulation de l’Energie estime donc que le coût de soutien public pour le projet au large de Dunkerque se situera entre -266 M€ (c’est-à-dire que jusqu’à 266 M€ pourraient être reversés par le lauréat à l’État) et 540 M€. À terme, il peut également être envisagé des parcs sans subventions publiques (hors raccordement) même si l’incertitude relative aux prix de marché à long terme de l’électricité pourrait freiner leur développement.
Focus sur le raccordement :
Par ailleurs, en 2017 et 2018, le cadre législatif et réglementaire pour le raccordement des projets éoliens en mer a fait l’objet d’une large transformation. Celle-ci a permis de baser le régime français sur les meilleures pratiques observées en Europe, et de transférer au gestionnaire de réseau (Rte) la responsabilité des raccordements. Ces modifications ont comme principale conséquence de faire porter au gestionnaire de réseau, via le Tarif d’Utilisation des Réseaux Publics d’Électricité (TURPE), le coût des raccordements, qui constitue une composante significative du coût complet de l’éolien en mer. Le TURPE est présent sur la facture de tous les consommateurs, particuliers ou industriels, et son montant est fixé par la Commission de régulation de l’Énergie (CRE). Le TURPE permet à la fois la couverture des coûts engagés par les gestionnaires du réseau ainsi que la rémunération des investissements des gestionnaires. Il vise à assurer la neutralité du service rendu par les gestionnaires du réseau d’électricité pour tous les fournisseurs et à l’adresse de l’ensemble des particuliers et professionnels.
Pour plus d’informations, nous vous invitons à vous référer à la documentation produite par le maître d’ouvrage:
- la fiche #7.7 « Enjeux techniques relatifs au choix de la localisation, à la construction et l’exploitation d’un parc éolien en mer » (voir en ligne)
- la fiche #12 “Combien coûte un parc éolien en mer en France ? Pourquoi et comment l’Etat a-t-il choisi de soutenir le développement de l’éolien en mer en France” (voir en ligne)
Nous vous invitons également à vous référer aux documents suivants:
- WindEurope, Wind energy in Europe in 2018. Trends and statistics, Février 2019 (voir en ligne) ;
- WindEurope, Offshore Wind in Europe. Key trends and statistics 2017, Février 2018 (voir en ligne) ;
- Rapport annuel du Comité de gestion des charges de service public (voir en ligne)
[1] Offshore Wind in Europe : key trends and statistics 2017, p. 16
[2] Offshore Wind in Europe : key trends and statistics 2018 , p. 17-18
[3] Déclaration faite par le représentant de Siemens Gamesa, dont les turbines sont installées dans le parc de Hywind, lors de la réunion publique du 18.01.2020 au Havre, organisée par la Commission Particulière du Débat Public.
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