Débat public - Plan national de gestion des matières et déchets radioactifs
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A320 • Pour la Transmutation 1
Retenue
A quelques mois de l’entrée en vigueur de l’accord de Paris, les analyses convergent pour reconnaître que l’énergie nucléaire fait partie des solutions pour combattre le dérèglement climatique. Elle fournit beaucoup d’énergie avec très peu de gaz à effet de serre. Les pays européens émettant le moins de CO2 par habitant sont également ceux qui associent le nucléaire aux sources renouvelables et aux économies d’énergie. Mais si l’énergie nucléaire a sa place dans notre société, elle doit sans cesse s’améliorer, devenir plus sûre et réduire la taille et la durée du stockage des déchets à vie longue en ramenant ceux-ci à une radiotoxicité qui ne dépasse pas celle de l’uranium dans la nature. Il se trouve que les sciences nucléaires proposent une piste : la transmutation. Cette note expose pourquoi la France doit s’engager fortement dans le projet européen MYRRHA.
En transformant les corps radioactifs de longue durée en corps radioactifs moins persistants et moins radiotoxiques, la transmutation est le moyen de réduire la longévité et la chaleur des déchets radioactifs, limitant ainsi le dimensionnement du stockage ultime. C’est l’une des voies de gestion des déchets HAVL énumérées par la loi Bataille de 1991, mais elle est renvoyée à l’avenir, comme un sous-produit éventuel de futurs réacteurs à neutrons rapides. « Pourquoi se donner tant de mal ? » demandent les spécialistes qui campent sur leurs certitudes confrontés au déclin de leur industrie. « Les déchets concernés sont en très petite quantité et ils sont suffisamment enclavés et lourds pour rester en place.»
Si l’énergie nucléaire est devenue insoutenable dans l’opinion, c’est précisément à cause de la pérennité vertigineuse de ces déchets-là. Réduire ces déchets, c’est faire disparaître le principal grief fait à l’énergie nucléaire. La transmutation est une amélioration, innovante pour l’acceptation du nucléaire, avant d’être une nécessité technique. De plus elle donnerait une orientation nouvelle à l’industrie nucléaire française qui ajouterait à la production d’électricité les savoir-faire du démantèlement, du retraitement des déchets, du recyclage des combustibles et de la transmutation des déchets.
La transmutation ne saurait être abandonnée au hasard des retombées techniques d’une nouvelle génération de réacteurs nucléaires électrogènes. Et d’ailleurs lesquels ? Et quand ? Non, la transmutation est un projet en soi qui doit faire l’objet d’installations spécifiques dédiées. Il s’agit de casser les atomes radioactifs persistants avec des neutrons rapides pour obtenir des atomes stables ou à radiotoxicité plus brève. Différentes techniques sont envisageables. Le meilleur outil, à ce jour, est un réacteur nucléaire spécialement conçu à cet effet piloté par un accélérateur de particules. C’est le dispositif que la loi du 28 juin 2006 prescrit d’étudier. C’est la conception du projet de transmutation le plus avancé, nommé MYRRHA, en Belgique, et qu’il faut soutenir.
Si le gouvernement prend une décision concernant l’avenir du programme nucléaire français, la transmutation devra en faire partie. Pas de nouveaux réacteurs sans transmutation, tel devrait être le mot d’ordre. La France compte nombre d’organismes, de chercheurs et de professionnels motivés pour faire progresser la chimie nucléaire et la transmutation, jusqu’à un récent prix Nobel de physique partisan d’utiliser la technique du laser. Ce qui manque c’est le pilotage politique. La gestion des déchets nucléaires est évidemment liée aux choix nucléaires de demain. Mais l’indécision des gouvernements laisse craindre une mort lente de l’industrie, le pire scénario pour la sûreté.
La France est l’un des pays qui ont choisi de retraiter les combustibles usés. Ce savoir-faire acquis à La Hague et au CEA en matière de séparation des corps radioactifs contenus dans les déchets doit être développé pour en isoler, conditionner et transmuter les fractions les plus persistantes.
C’est l’ensemble des produits de fission et des actinides mineurs (43 t/an) qu’il est prévu de vitrifier en vrac et de déposer à la fin du siècle dans le centre souterrain de CIGEO. La radioactivité des produits de fission, d’abord dominante, décroît en trois siècles et ce sont ensuite les actinides qui représentent l’essentiel de la radiotoxicité à long terme. Certains d’entre eux ont des périodes extrêmement longues. Leur transmutation réduirait leur durée de vie d’un facteur 1000 et diminuant leur chaleur, diviserait par 8 l’empreinte écologique du stockage ultime. Ainsi, au bout de 300 ans, la radiotoxicité résiduelle serait comparable à celle de l’uranium naturel. Mais alors, s’il faut continuer à vitrifier les produits de fission posant le moins de problèmes, il faut au contraire séparer les actinides pour les transmuter, et fournir un effort identique pour les produits de fission les plus coriaces.
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